Au détour d’un silence
Lourd
Bruissant
De chuchotements,
De larmes, de cris de joie,
J’ai entendu ta voix
Me chanter
Me murmurer
Dors mon enfant dors
Au détour d’un silence
Empli de mille chuchotements
Sombres et lourds
Pesant sous tes râles oppressants
J’ai enlacé ta main
Doucement
Très doucement
Puis mouché la chandelle de nos yeux
Pour se quitter,
Ensemble, seuls et apaisés,
Sans un mot,
Sans l’ultime mot
Dans la pénombre de nos cœurs groguis
Pour nous dire adieu
Comme savent le murmurer les bienheureux, les bien-aimés chevaliers
Au détour d’un silence
Plein de mille chuchotements
J’ai aperçu la lune pleine et ronde
Me dire viens fillette
Allons à la crevette
J’ai entendu tes rires, ta voix, ton chant
Très doucement avec mille précautions
Qui m’attirait vers une anse sombre et ténébreuse, profonde
Pour me montrer
Comme le font les parents
Un énorme bouquet
A la dérobée des gracieux poissons
Comme deux compagnons
Comme deux gais lurons
Scellant à jamais notre union
Au détour d’un silence
Repu de mille chuchotements
Dès la levée de l’aube
J’ai entendu et reconnu ta voix
Dans un sommeil lourd de rêves éveillés, de rêves inventés
De mémoire oubliée
En souvenirs fragiles et vacillants
Ta voix qui pour moi seule chantait
Je t’écoutais et je t’aimais
D’un amour pur
Celui de l’enfant que j’étais
D’un amour consolidé par les ridelles des ans
Qui sont venues tracer
A l’encre moqueuse
Les contours de ton esprit rieur, aimant, charmant
Des pensées et du cœur de la femme
Que je suis devenue aujourd’hui
Au détour d’un bruit
Plein d’un douloureux et prémonitoire silence
Je cherche inquiète et apeurée
Les traits de ton visage
Pour plus tard peut-être le dessiner
Mais plus tard c’est demain
Et demain c’est l’oubli, la tristesse infinie
Qui effacera par mes mains
Par mes larmes
Ce dessin paternel
Pour continuer à être aujourd’hui
Sans toi qui m’a donné la vie
Au détour d’un silence
Plein de mille chuchotements
Un jour je t’avouerai
Que je ne te reconnais plus
Mais le jour venu
Je saurai qui tu es et te reconnaîtrai
Je te prendrai la main
Pour te murmurer sous une brise taquine
C’est la lune des crevettes
Qui nous attend avec ses filets
Viens, partons et sautons sur les rochers
Faisons nos adieux
Aux poissons malicieux
Comme deux enfants rieurs et étonnés
Comme fille et père à jamais heureux
Et apaisés par l’ultime baiser.
Françoise BOGARD
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